dimanche 27 mars 2011

Vive l'amitié franco-allemande

Des doigts en fer arriment la rive allemande à la rive française. On ne voit plus le ventre gonflé des noyés, les vieux guerriers sont repus. D'un jardin à l'autre, le Rhin goutte à goutte, l'air de ne pas y toucher.


On peut trouver l'architecture contemporaine tout à fait pertinente pour dresser un pont entre deux rives (Passerelle de Mimram, entre Strasbourg et la ville allemande de Kehl).
On peut aussi préférer Tomi Ungerer.

L'amitié franco-allemande et la coupe du monde de football (2006): bordel géant à Berlin...

mercredi 9 mars 2011

Une tragédie #3

Heureux, Georges, offert à ses sauvageries d’enfant, parce qu’il ne sait pas que c’est sa dernière fois.
Son visage séduit une jeune et grosse fille accoudée à un bar, une grosse et jeune adolescente rendue à son troisième fût de bière tiède. Il sait, avant même d’avoir fichu son sexe dans le bourrelet de son ventre qu’elle sera tout entière à lui, la grosse, sa graisse, son sourire poupin, ses fûts de bière, tout, il prendra tout, jusqu’à son odeur écœurante.
Sourire de carne aux lèvres, il pose ses mains sur le zinc poisseux, rue de la joie, dans le village de la soif. Ah, Georges, Georges… nul homme digne de ce nom ne pourra te reprocher tes enfantillages. Un peu plus tard, une fois vomis les matins de beurre rance, tous savent bien qu’aucun bourrelet de tendresse ne peut faire oublier la tristesse d’une débandaison précoce. Mais tous, la queue gonflée d’humanité, tous, sans exception Georges, referont au soir le geste préhistorique de la queue noyée dans un bourrelet de graisse. Pour l’honneur.
C’est exactement ce que tu fis ce soir là, pour la première et la dernière fois de ta courte vie.

mardi 8 mars 2011

Où Denise rencontre enfin le léopard

Mieux vaut ne pas l’inquiéter.
Rester assise, immobile à quelques mètres de lui et le regarder me regarder.
Il est couvert de poils jaunes et noirs, ça lui donne l’air de ne pas en être, de ne pas être de ce monde ci, en tout cas d’arriver tout droit d’une savane à part entière, sans arbre, mais débordant jusqu’à la moelle de rivières de sang, de lambeaux de chair.
Son nez… Je n’ai rien à en dire.
Il n’a pas vraiment un nez. Une gueule, ça oui, il en a une. C’est une sacrée gueule, d’orgasme et de perdition, comme s’il était possible d’avoir l’un sans l’autre.
Il a des yeux exorbités, comme le vide, tout autour de lui. J’attends que nos respirations s’harmonisent. Et puis : « à quoi tu joues, dis moi, c’est quoi ce jeu ? »
D’usage, la réponse : « ce n’est pas un jeu », mais articulé avec les dents, ça devient impressionnant.
- Saloperie. Il y a un interphone en bas. Comment t’es rentré ?
- J’ai appuyé sur tous les boutons
- Vache. Tu as l’intention de…
- Non
- Ah… Ouf…
- En revanche…
- Quoi ?
- Je voudrai que tu vides ton sac.
- Que je…
- Que tu dégoises, que tu balances, que tu déterres la merdasse, que tu ailles la chercher au fond du tréfonds de ton trognon, que tu y laisses un ongle ou deux, je m’en fiche. Pas mon problème.
- C’est tout ce que tu as à me dire ?
- C’est pas déjà pas pas pas si mal, non ?
- Comment tu t’appelles ?
- Un mélange de douceur et de viande saignante.
- C’est pas un nom, ça.
- Denise non plus, c’est pas un nom.
- Denise c’est un nom. Sainte Denise c’est dans le calendrier des saints. Ma fête, c’est le 15 mai.
Il a une gueule de léopard, je vais donc l’appeler Léo. Que ça lui plaise ou non.